La Cerisaie Tg Stan Getz

Ces gens-là sont essentiels et il faut les garder parmi nous en les mettant en scène de façon humble et audacieuse. Vous êtes un collectif, sans metteur en scène. Comment créez-vous ensemble? Nous travaillons longuement autour de la table, en traduisant la pièce ensemble et en en parlant. On envisage des choses mais on n'essaie rien sur le plateau, parce qu'on ne fait pas semblant qu'il y a un spectacle alors qu'il n'y a pas de public. Pour La Cerisaie, comme nous sommes 10, nous avons quand même pris dix jours pour le travail chorégraphique et scénographique. Mais la manière dont on va dire les phrases et agir en présence du public revient à chacun. Pour les autres aspects du spectacle, chacun d'entre nous a un peu ses passions. Certains s'intéressent beaucoup aux meubles, d'autres à la musique, il y en a qui acceptent leurs propositions parce qu'ils n'ont pas vraiment d'opinion, d'autres au contraire qui donnent beaucoup leur avis… Mais nous partageons tous une passion pour le travail du texte, autour de la table, avec toutes les traductions (français, anglais, allemand, flamand) pour trouver le mot juste, créer notre propre traduction, en flamand d'abord et maintenant en français.

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Le samedi 12 décembre 2015, par Laurent Sapir Mais où sont passées les tchékhoviennes? Je veux dire par là ces héroïnes au temps suspendu, ces visages au futur antérieur emprunts à la fois de langueur et de pétillements, ces êtres mélancoliques mais jamais dépressifs... L'idéal féminin est là, oblique, diagonal, dans la contingence et l'interstice, rebelle aux agendas de sociabilité si bien cadencés ainsi qu'à cette spontanéité de façade qui tient lieu de carapace. La Lioubov Andreevna de La Cerisaie, hélas, est devenue un spécimen rare. C'est trop notre came, à vrai dire, ce baroud d'honneur de l'amoureuse et propriétaire de domaine déchue, larguée et marquée par l'épreuve, avec cette manière d'en rajouter dans la gaieté (jusqu'aux confins du clownesque) pour mieux cacher les chagrins, mais aussi cette angoisse de moins en moins diffuse face au tournis de l'époque... Cela respire l'authenticité, ne serait-ce que dans le jeu tout en vivacité de Jolente De Keersmaeker (la sœur de la chorégraphe Teresa De Keersmaeke r), l'une des quatre fondatrices du tg Stan dont cette Cerisaie couronne plus de 25 ans d'investissements dans un théâtre sans flonflons et constamment à hauteur d'âme.

La Cerisaie Tg Stan 4

Il y a malheureusement un léger effet pervers à un tel plaisir du théâtre pour le théâtre. À certains moments de cette Cerisaie, l'intrigue de la pièce de Tchekhov prend le dessus sur l'intrigue du théâtre que tg STAN raconte si bien, et le spectacle, sans perdre de sa qualité, semble quelque peu s'affaisser. Difficile pour le collectif belge de se pencher sur un texte aussi sacré, lorsqu'il a précisément l'habitude de s'asseoir dessus. C'est ce que faisait littéralement Matthias de Koning dans Onomatopée, se servant du script comme d'un coussin; c'est aussi ce que faisait Frank Vercruyssen (drôlissime et touchant en Lopakhine) l'année dernière dans My Dinner with André, lorsqu'il feignait d'avoir oublié une réplique. En se moquant du texte, les acteurs continuaient à jouer, signifiant alors que le théâtre se débrouille très bien sans. Il reste que le choix de la pièce est en accord avec l'idée que Tchekhov s'en faisait: profondément comique, presque farcesque. La Cerisaie, d'Anton Tchekhov, mise en scène de tg STAN du 2 au 20 décembre 2015 du mercredi au samedi à 20h30 le mardi à 19h30 le dimanche à 15h30 représentation supplémentaire le dimanche 20 décembre à 15h La Colline, théâtre national 15 rue Malte-Brun, Paris 20e métro ligne 3 et 3 bis, station Gambetta (sortie n°3, Père Lachaise) bus 26, 60, 61, 69, 102 arrêt Gambetta mairie du 20e 01 44 62 52 52 / © Tous droits réservés.

C'est limpide et aéré. Tout comme la scénographie ouverte, composée de morceaux de fenêtres qui sont déplacés au gré des actes. Les éclairages soignés signent les changements d'heures tandis que quelques tables et tabourets nous transportent au bord de l'eau, dans la chambre des enfants ou dans la salle à manger. Cette mise en scène est un pur enchantement. C'est burlesque et contemplatif. C'est joyeux et absurde. Les invités de la Cerisaie s'enivrent et dansent sur des rythmes électro. La gouvernante Charlotta Ivanovna impressionne tout le monde avec ses tours de magie. Il y a de l'insouciance dans ce groupe de bourgeois russes contraints de quitter cette maison dont la vente est inéluctable. Avant le départ pour la gare, tous les comédiens rangent les éléments de décor côté jardin pour laisser le plateau vide, en oubliant ce bon vieux Firs enfermé dans la Cerisaie. Stijn Van Opstal continue de faire le clown.